L’obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral
La Cour de cassation rappelle qu’une fois que la victime a présenté des éléments de faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral, il revient à l’employeur de prouver que ceux-ci ne constituent pas un tel harcèlement. De plus, la Cour de cassation indique à nouveau que l’absence de harcèlement ne peut être invoquée pour écarter l’obligation de prévention de l’employeur.
Un salarié engagé en qualité de vendeur sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur pour harcèlement moral et non-respect de son obligation de prévention des risques professionnels. Il est finalement licencié pour inaptitude physique deux ans plus tard.
La charge de la preuve d'un harcèlement moral
En application de l’article L. 1154-1 du code du travail, si un salarié invoque des faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral, la charge de la preuve est renversée. L’employeur doit alors prouver qu’il ne s’agit pas d’un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge doit alors se prononcer sur les preuves apportées par l’employeur pour prendre sa décision.
Dans cette affaire, la cour d’appel a estimé que les éléments invoqués ne laissaient pas supposer l’existence d’un harcèlement. Or, la Cour de cassation indique que la cour d’appel avait retenu que le salarié présentait des éléments, qui, pris dans leur ensemble, laissaient supposer l'existence d'un harcèlement moral. Aussi, elle aurait dû demander à l’employeur de prouver que les agissements invoqués étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. La Haute Cour casse donc l’arrêt de la cour d’appel.
Distinction entre l’interdiction du harcèlement moral et l’obligation de prévention des risques professionnels
Le salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que l’employeur n’a pas respecté son obligation de prévention des risques professionnels. La cour d’appel déboute le salarié de sa demande au motif que puisque le harcèlement moral n’a pas été prouvé, l’employeur n’a pas manqué à son obligation de prévention des risques professionnels. Pour autant, la Cour de cassation vient rappeler que l'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle.
Dès lors, la cour d’appel ne pouvait pas s’appuyer uniquement sur l’absence de harcèlement pour justifier le respect de l’employeur à son obligation de sécurité et débouter le salarié de ses demandes.
Remarque : la Cour de cassation s’était prononcée en 2017. L'employeur ne peut pas se prévaloir du fait qu'une salariée se place sur le terrain du harcèlement moral pour indiquer qu'on ne peut pas lui reprocher un manquement à son obligation de prévention des risques psychosociaux (Cass. soc., 6 déc. 2017, n° 16-10.886).
à Cass. soc., 25 mai 2022, n° 21-12.811
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